Bouteflika President suite 3

Publié le par lydia

Bouteflika entame son mandat par la répression et la propagande :

 

La répression de Bouteflika

 

 

La règle générale impose à tous les candidats aux élections à tous les niveaux de jouer un jeu pour gagner le cœur de la population et celui de la presse. Mais dans notre cas, avec M. Bouteflika, cette règle est mise à la poubelle. Pour quelle raison ?  A l’œil nu, on pouvait constater que M. Bouteflika n’était pas un candidat aux élections présidentielles du 15 avril 1999. Il était le président désigné d’avance. Et quand on est président dans un pays souffrant, ayant suivi une longue formation au sein d’un pouvoir dictatorial, le comportement et les agissements brusques  et méprisant vis à vis de la société civile se manifestent naturellement.

 

            Au lendemain du scrutin présidentiel, la marche pacifique à laquelle ont appelé les six candidats a été interdite par le pouvoir. Les quelques manifestants qui ont pu rejoindre la place du 1er Mai ont été réprimés par les forces de la répression.

 

            Encore une fois, dix jours plus  tard, soit le 26 avril 1999, le pouvoir a fait sortir ses policiers et ses gendarmes. Cette fois-ci, il a élargi sa fourchette de répression en faisant sortir les groupes d’intervention républicains (GIR) qui étaient méconnus, avant ce jour, par la population. Toutes les rues menant à la place du 1er Mais, lieu de la manifestation, ont été bouclées par une armada de forces de répression  qui n’ont pas hésité à empêcher même les résidents de ce quartier à rejoindre leurs domiciles.

 

            Pour séduire l’opinion nationale et internationale, Bouteflika a choisi la rumeur et la critique dans toutes les directions comme nouvelle idéologie. Quelques jours après son intronisation, des indiscrétions de la presse jamais démenties, mais jamais confirmées (aucune personne ne pouvait dire : Oui je l’ai vu), indiquaient que le chef d’Etat effectuait des visites éclaires de nuit et inopinées au port d’Alger, à l’hôpital Mustapha Pacha… Certains journalistes sont allés jusqu’à qualifier les interventions du président de fait inédit, à l’instar de celui qui a écrit : « jamais un président n’est allé aussi loin dans la critique de l’Etat, de ses institutions, de leur fonctionnement ainsi que des hommes qui sont à leur tête. » Attention, Zoro est arrivé ! On a bien trouvé la stratégie de donner espoir au peuple en lui faisant écouter ses propres critiques par la bouche du président. Mais des années plus tard, ce même peuple a fini par découvrir qu’on était en train de le bercer. La suite, on la connaît tous. Les citoyens se sont révolté dans presque tout le territoire national en 2000 et 2001, ce qui a poussé ce pouvoir à montrer sa véritable image de oppresseur .

 

Matraque contre les non-voyants :

 

            Même les non-voyants ne sont pas épargné par la répression durant cette période de Bouteflika. Le 17 octobre 2000, une centaine de non-voyants des entreprises de promotion et d’insertion des handicapés venus protester pacifiquement devant le siège du ministère du travail et de la protection sociale n’ont pas été épargnés par les brigades anti-émeutes en faction. Pour empêcher les protestataires de s’approcher de l’immeuble, les policiers n’ont pas hésité à utiliser leurs matraques pour les disperser. Incroyable mais vrai. En 2000, l’unique sort réservé aux non-voyants, dans un pays qui se dit démocrate, est la matraque. Déjà le fait d’imaginer de telles scènes donne la chair de poule.

 

Chasse aux couples :

            Durant le règne de Bouteflika, on peut dire qu’on a tout vu. De l’amnistie des terroristes sanguinaires, la famine qui tue ( voir la mort d’un écolier de 11 ans, Mohamed Belhimer, en pleine classe de l’école primaire Messaoud Belhimer à Jijel, au courant du mois de février 2001) à la chasse des couples. On amnistie la haine et on banni l’amour. Plusieurs couple ont été arrêtés dans des endroits différents de la capitale par les services de sécurité et inculpés d’atteinte à la pudeur. Pour protester contre ce genre de pratique, une association « Vie » avait appelé à une marche pacifique pour le 2 mars 2001 à Staoueli, mais comme d’habitude, le pouvoir n’avait rien à offrir aux couples marcheurs que la matraque.  

 

Répression contre le «  5 octobre » :

            On a dit que le régime sous le règne de Bouteflika  tire sur tout ce qui bouge y compris ceux qui veulent commémorer la date du 5 octobre 1988. L’association Rassemblement Action-Jeunesse (RAJ) qui depuis sa création en 1993, a fait de cette date l’occasion d’organiser chaque année un rassemblement à Alger pour rendre hommage aux victimes d’octobre 1988.  Le 5 octobre 2001, les manifestants ont été  empêchés par les forces de la répression de tenir leur rassemblement. Le président de cette association, qui d’ailleurs  a  été arrêté avant qu’il soit libéré en fin de l’après midi avait déclaré à la presse : « Nous ne voulions que rendre hommage pacifiquement aux martyrs du 5 octobre 1988 ainsi qu’à tous les autres martyrs de la démocratie. Nous voulions aussi, revendiquer le respect des libertés chèrement acquises en octobre. » Bouteflika qui veut remettre en cause le multipartisme confirme sa volonté d’effacer même la date qui a ouvert les portes à la création des formations politiques.

 

Matraque contre toute forme d’expression :

            Le jeudi 7 juin 2001, on pouvait voir sur la une du quotidien Le Matin, le commandant Azzedine, ancien sénateur, qui recevait  sur la tête la matraque d’un agent anti-émeute. Les manifestants qui ont répondu à l’appel de cette coordination et qui sont venus  défendre les libertés démocratiques et s’opposer au projet d’amendement du code pénale, un projet de lois visant à museler la presse et toute formes d’expression, ont été réprimés dans le sang. La presse avait donné le chiffre de 20 blessés et une quinzaine d’arrestations.

Une semaine plus tard, c’était au tour de la  fameuse marche du 14 juin. Les manifestants venus massivement de Kabylie, ont été réprimés avec une rare violence. Par conséquent, la manifestation s’est dégénérée pour se transformer en un drame. Durant cette manifestation, deux journalistes ont trouvé la mort.  Ainsi la voie des manifestations ouverte par le front des forces socialistes un certain 3 mai 2001 a été fermée par le pouvoir qui a trouvé ses arguments dans cette tragédie.  Le 19 juin de la même année, le Comité des citoyens intercommunal de Ain Benian avait appelé à une marche, ce jour-la les manifestants étaient exclusivement des femmes, mais devant un pouvoir totalitaire, même si la femme est de nature pacifiste, leur marche a été interdite. Les femmes ont été dispersées par les forces de l’ordre. Elles étaient sorties dans la rue pour dénoncer la répression et la « hogra ».

 

Comme on l’a dit plus haut, la marche du 14 juin était pour le pouvoir, la clef avec  laquelle il a pu refermer la porte devant toute forme d’expression. Le 14 mars 2002, le FFS avait appelé à une marche pacifique à Alger, mais les forces de l’ordre étaient là pour réprimer les manifestants dans le sang. Les journalistes ont vu leurs appareils photos confisqués et des centaines de jeunes personnes ont été malmenés par ces forces et ont été  emmenés de forces vers des commissariats, y compris des députés de ce parti.   

 

Bouteflika rend hommage à Ferhat Abbas(24-08-1999)

 

            Lors de la commémoration du centième anniversaire de la naissance de Frehat Abbas(le 24 août 1889), auteur du « manifeste du peuple algérien » en 1942, organisée à Jijel au niveau de la salle de conférence de la cité administrative,   Bouteflika, en  campagne pour le référendum portant sur la concorde civile, n’a pas voulu laisser passer cette occasion. Alors, il s’est déplacé à Jijel où il a inauguré la nouvelle aérogare et la tour de contrôle de l’aéroport de cette  ville portant le nom de Ferhat Abbas. Bouteflika a rendu hommage à cet homme révolutionnaire, mais, comme on vient de le dire, Bouteflika était là pour vanter « son »projet de lois et ses décisions spectaculaires, à l’instar de la radiation des wali. Le jour où on a vu l’hommage rendu par le président français, M. Jacques Chirac, à Dumas, on a compris que le déplacement de Bouteflika faisait plus partie de sa campagne électorale que d’une véritable volonté de rendre hommage.

 

Bouteflika à Crans Montana le 26-06-1999

             Cette visite à Crans Montana était la première sortie officielle de Bouteflika à l’étranger. Il était accompagné par un groupe de responsables du secteur économique et de chefs d’entreprises. Sur place, il avait envoyé un message à Hocine Ait Ahmed pour lui souhaiter une bonne santé et le bien être personnel. Le deuxième message qui aurait plus satisfait Ait Ahmed est d’entendre Bouteflika déclarer que : « l’arrêt du processus électoral (de 1992) a été un coup de violence. » Ce qui nous a aussi marqué dans cette visite, c’était le fait d’entendre Bouteflika dire : « Renseignez-vous sur ma popularité à Alger, je suis prêt à financer vos sondages à ce sujet » Et quelques mois plus tard, Bouteflika est sorti « l’homme de l’an 2000 » dans un sondage élaboré par le quotidien Le Matin .

 

Bouteflika à Rimini en Italie

            « L’islam est religion d’Etat pour des raisons sociologiques », et l’arabe dans ce cas ? Il n’y a pas d’autres raisons mise à part la raison politique, n’est-ce pas M. Le président ? Quand on est dans un pays comme l’Italie, il est plus nécessaire de parler de la liberté des femmes, c’est dans ce sens que Bouteflika avait déclaré : « l’émancipation de la femme se fait et sera encouragée par tous les moyens. », mais une fois sur la terre algérienne, ce même président change d’avis, l’odeur des islamistes qui l’entourent se fait sentir dès sa décente de son avion spécial au niveau de l’aéroport Houari Boumediene.( Voir les déclarations de Bouteflika par rapport aux femmes). C’est aussi à partir d’une ville européenne que Bouteflika lave le sale linge en déclarant : « Depuis que je suis au pouvoir, je suis arrivé à cette conclusion que l’Etat algérien était bien pourri. » avant d’ajouter « Je ne connais pas de pays au monde où la crise morale a débouché sur un si grand nombre de perversités et où l’Etat national a, à ce point, vacillé. » Si cette conclusion était destinée au peuple algérien, on peut dire que ce dernier l’avait depuis longtemps et dans le cas où elle est destinée aux investisseurs étrangers, ces derniers ne négocient qu’avec le concret et surtout avec l’avenir. Enfin, peut-on sentir la pourriture de l’Etat algérien à partir du Golf ? Dans le but de préparer l’opinion internationale par rapport à « sa » concorde civile et non pas de consolider le contrat de Rome, Bouteflika a dit que « les initiateurs de la violence en Algérie ne sont pas toujours ceux que l’on croit », « nous avons des marchands de la mort à l’intérieur du pays qui ont fait de cette situation un fonds de commerce » avant d ‘ajouter que la violence est pratiquée par « un magma de brigandage, de travail de mafiosi, de gens véreux, de commerçants en mal d’argent. » Tout le monde est convaincu, et nous dedans, que les intégristes islamistes ont pratiqué une violence inqualifiable en Algérie, et ce depuis déjà l’assassinat de ce jeune étudiant, dans la cité universitaire de Ben Aknoun. D’ailleurs, Bouteflika lui-même, en appelant le 21 mars 2000 les Ulimas, lors du colloque international sur l’islam, de cette façon « je vous prie d’user de toutes vos forces, votre savoir et votre sagesse dans le sens de la réconciliation des enfants d’une même nation » montre bien que la violence est aussi pratiquée par des islamistes. Ce jour-là, Bouteflika a ajouté : «  j’ai souvent souhaité détenir toutes les prérogatives  qui me permettraient d’annoncer (…) le grand pardon et l’amnistie générale qui n’excluent personne, partant de l’idée que Dieu pardonne les fautes passées. Cependant, Dieu n’exige pas de ses hommes ce qui est au-delà de leurs forces. »  Mais, il y a aussi une grande partie du peuple qui est convaincu que beaucoup de gens ont bien profité de ce climat de violence pour régler des comptes et changer les données du marché à leur profit…

 

            Pour mettre fin à ce climat de violence grandissante, il ne suffit pas d’amnistier arbitrairement. La paix comme on dit,  ne se décrète pas. La paix se base sur une véritable justice. Une justice indépendante qui mettra des noms sur ce magma dont parle le président. Et pour atteindre ce stade, le pays a besoin d’un homme irréprochable ; car, quand on est sûr de soit-même, on peut avancer sans rien craindre. Là, on pourra lutter pour l’instauration de cette justice. Mais quand on voit que le président tire dans tous les sens, là, on peut dire que ce dernier n’a pas encore saisie la situation, et dans le cas contraire, il ne sait pas où veut-il aller au juste.  Bouteflika avait déclaré : « Celui qui sera du côté de la paix sera pour le peuple algérien et celui qui sera contre, puisqu’il le manifestera par quelque action que soit, sera jugé comme un hors-la-loi par tous les moyens que confèrent l’Etat, la constitution et les lois de la République. » et apparemment, ces « hors-la-loi » sont déjà identifiés par le président qui a dit « Les ennemis internes de l’Algérie sont identifiés et savent parfaitement que lorsque je parle d’eux, il se reconnaissent d’eux-mêmes. » comme c’est aussi le cas pour ceux de l’extérieur. Cette phrase du président : «  Nous n’avons pas besoin d’interprètes ni d’intermédiaires pour qui veut quoi et qui dit quoi  à qui »  rime bien avec la question « qui tue qui ? », ce qui nous fait croire qu’elle est adressée aux partisans de cette question. Si c’était le cas, la réponse à qui veut quoi ? est : on veut la vérité, rien que la vérité. Pour qui dit quoi ? On dit que « les initiateurs de la violence en Algérie ne sont pas toujours ceux que l’on croit. ». Pour qui ? pour l’auteur de cette dernière phrase et à ceux  qui l’ont placé au pouvoir. Pour conclure, en tant qu’un « hors-la-loi » vu qu’on est tout à fait contre la paix proposée par cet « Etat pourri », sachant qu’elle est préparée avant l’arrivée de Bouteflika (en admettant que ce dernier veut réellement rétablir la paix).Alors , on vous donne l’occasion de nous juger par la constitution « qui n’a ni queue ni tête ».  (Phrases de Boutef,  tirées dans Le Matin du 25-08-1999)

 

Bouteflika et les juifs :

            Tout le monde, de l’intellectuel à celui plongée au fin fond de l’ignorance, est au courant que, sur le plan économique, les juifs ont une main très large qui touche pas mal de pays dans le monde. Pour gagner les investisseurs étrangers, Bouteflika a misé sur les juifs. Déjà, à partir de Constantine, lors du 2500em anniversaire de Cirta, il a tenu à rendre hommage aux juifs de cette ville.

 

Son tête-à-tête avec Ehud Barak , le premier ministre Israélien :

 

            Ce face-face entre le président algérien Bouteflika et le premier ministre Israélien, M Ehud Barak, le dimanche 25 juillet 1999, une rencontre de sept minutes, a fait la une des médias internationaux sauf la chaîne de télé algérienne. Bouteflika a su tiré profit sur le plan du marketing politique durant les obsèques du roi Hassan II.

 

            La classe politique a réagi  par rapport à cet événement. Parmi ces réactions, on note celle du MDS exprimée par son secrétaire Général, M. El Hachemi Cherif qui trouve que cette rencontre « entre dans la nature des choses » avant qu’il ajoute qu’ « on ne peut pas être royaliste plus que le roi ». Pour lui « il y a eu une évolution au proche orient » alors « les relations devraient aller vers la normalisation. ». Le PRA  et l’ANR ont aussi réagit positivement.   

 

Bouteflika et Enrico Macias :

 

Voici les propos tenus par le chanteur Enrico Macias dans les colonnes d’El watan (10-02-2000) qui l’avait contacté suite aux propos hostiles tenus contre lui par Abdelaziz Belkhadem dans une interview qu’il a accordé au quotidien arabophone EL Youm.

 

 

Enrico Macias :   « Je serai à Alger le 16 mars (2000) », « Je réponds à l’appel du peuple algérien et du président Bouteflika, lequel est seul qualifié pour m’inviter. Je suis en train de préparer ardemment mon voyage, rien ne m’arrêtera car je n’oublierai jamais le geste du président Bouteflika qui est en train de détruire tous les tabous qui existent à cause de ces gens. Je ne veux pas entrer en polémique avec eux. Je serai en Algérie pour le peuple algérien, pour le président Bouteflika et mon Algérie. Ce sera trois jours de fête. »

 

 

            Quelques jours plus tard, le directeur de l’OREF, M. Abdelhamid Bouhour, qui est l’organisateur et le négociateur de la tournée du chanteur Enrico Macias, a été limogé de son poste. Le 5 mars 2000, Enrico Macias a annoncé le report pour « quelques semaines ou quelques mois », de sa tournée en Algérie..

 

            Lors de sa visite officielle en France, Bouteflika a rencontré, dans sa résidence, le samedi 17 juin 2000, dans sa résidence une délégation du  conseil représentatif des institutions juives en France (CRIF), présidée par M. Henri Hajdenberg.  Après cette visite, ce dernier a déclaré à l’AFP que « l’Algérie est prête à reconnaître officiellement Israël et même à avoir avec l’Etat hébreu des relations privilégiées, si le volet palestinien et syrien de la paix au proche orient trouve une solution ».

 

 

 

Macias victime d’une fausse invitation

 

Enrico Macias qui a cru un jour que son rêve de chanter dans sa ville natale, Constantine, est sur la voie de se réaliser, a fini par découvrir qu’il était tout simplement manipulé par Bouteflika.. Dans son livre « Mon Algérie », édité chez Plon, ce chanteur  revient sur cette manipulation par ces phrases « J’aurais sans doute fini par me résigner si une invitation inespérée, officiellement lancée par le Président algérien Abdelaziz Bouteflika, n’était pas venue raviver toutes mes espérances ! Voilà, ça y est, je vais revoir Constantine ! Je vais chanter en Algérie ! (…).Quand le président Bouteflika arrive, il s’écarte du cortège officielle, se dirige vers moi et m’enlace. Nous nous embrassons comme deux frères qui se sont trop languis et, de la salle, les youyous fusent. Bouteflika se livre alors à une louange appuyée des juifs d’Algérie et à mon beau-père, avant de parler de moi : « Lorsque Enrico Macias, que j’invite officiellement à venir en Algérie, viendra à Constantine se recueillir sur la tombe de son beau-père, je serai à ses côtés. » A ces mots, j’éclate en sanglots. Je ne m’y attendais pas du tout. Je pensais qu’il se contenterait d’officialiser l’invitation, c’est tout. Pas qu’il s’engage plus loin. Fantastique ! En me saluant avant son départ, le Président me dit encore : « A bientôt, en Algérie. Nous avons beaucoup de choses à faire ensemble. » Ce sont ses mots exacts. Pendant ce temps, en Algérie, Abdelhamid Bouhrour organise une tournée dans six villes : Constantine, Annaba (ex-Bône), Alger, Oran, Tlemcen et Tizi Ouzou.(…) Malgré quelques rumeurs de menaces sur la tournée algérienne, nous pensons tout avoir gagné contre l’intégrisme et l’intolérance. Plus rien ne peut m’arrêter.(…) Comment pouvais-je alors imaginer ce qui allait s’abattre sur moi ? Toujours est-il que le lendemain de ce spectacle à l’Olympia, des rumeurs de « report » du voyage commencent à circuler. Pour des problèmes techniques et pour la sécurité, dit-on du côté algérien, il vaut mieux le différer. Au début d’ailleurs, même si au fond de moi je pense  qu’il s’agit  en réalité d’une annulation pure et simple, je refuse de croire. Là encore je me suis dis : ce n’est pas possible ! le Président Bouteflika en personne a engagé sa parole publiquement, il ne peut pas se dédire…(…)Pas moins de quarante-huit imams de Constantine se liguent pour appeler leurs ouailles à saboter le premier concert prévu dans ma ville natale. Mais bientôt, c’est carrément un ex-président de l’Assemblée nationale, Abdelaziz Belkhadem, un cacique du FLN, qui leur emboite le pas.(…) La dernière lueur d’espoir s’éteint le jour où j’entends le limogeage d’Abdelhamid Bouhrour, l’homme qui dirigeait l’office culturel chargé d’organiser ma tournée.(…)On l’a licencié sous prétexte  ridicule : il serait venu à Paris sans autorisation officielle.(…) j’entre en contact téléphonique avec Bouteflika. Je lui fais part des rumeurs…il reste très vague avec moi, très flou : « Oui, oui, nous maintenons la tournée. Et si par  hasard, cela ne se fait pas comme prévu le 16 mars, ce n’est qu’un report. C’est tout simplement un problème d’organisation lié à mon emploi du temps… Sinon, le processus est lancé, il n’y a pas de problème, tu viendras. » Cette fois encore, j’ai voulu croire à sa sincérité. Pas pour longtemps. J’ai la certitude que le Président me balade le jour où j’apprends la nomination d’Abdelaziz Belkhadem au ministère des affaires étrangères. Cet ex-président de l’Assemblée nationale dont j’ai parlé plus haut, celui-là même qui s’est dressé avec le plus d’intransigeance contre notre retour, devient ministre des affaires étrangères ! Là, j’avoue que la nouvelle m’a soufflé ! Un coup de poignard dans le dos ! Comment un Président qui a eu le courage de nous inviter, le seul qui a compris que l’Algérie ne doit rester interdite à aucun de ses enfants, installer à un tel poste un homme si rétrograde ? Comment peut-il espérer ouvrir son pays au monde avec un passéiste aussi revanchard que cet   Abdelaziz Belkhadem ? C’est le monde à l’envers ! Pour moi, le message est limpide : pour l’instant, tout espoir est mort et enterré.(…)Peu de temps après, j’apprends la visite officielle du Président algérien en France. Je me dis qu’on va enfin m’éclairer. De fait, je fais partie des invités à la soirée donnée en son honneur à l’Elysée par Jacques Chirac. Quand je vais serrer la main de Bouteflika, il m’embrasse chaleureusement et il me chuchote : « Arrête de t’occuper du Moyen-Orient. Occupe-toi plutôt de l’Algérie. » Voilà tout ce qu’il m’a dit. J’ai été tellement surpris que je suis resté coi. Encore une fois, on exigeait de moi que je choisisse mon camp, que je renie mon attachement à la paix au Moyen-Orient ! En dehors de cette rencontre, je n’ai plus jamais eu de contact avec lui. On ne peut pas dire qu’elle ait contribué à clarifier son attitude…(…) Si je devais faire un bilan de cette histoire navrante, je dirais que c’est l’image de l’Algérie qui en a été atteinte, pas la mienne.(…). »

 

 

             Voilà comment Bouteflika comptait  redorer le blason du pays. C’est un épisode qui nous montre l’absence de tout humanisme au sein des gens qui sont au pouvoir, des gens qui ont fait des sentiments d’Enrico Macias, un simple jeu politique. M. Enrico Macias doit savoir que Belkhadem n’est pas le seul islamiste qui se trouve dans le gouvernement  de Bouteflika, il y’a aussi le ministre des affaires religieuses, M. Ghalamoullaah, pour ne citer que celui-là, qui, à la question : « La charia n’est-elle exclusivement applicable que dans le code de la famille et pas dans d’autres domaines ? » du journaliste du quotidien le Matin du 25 novembre 1999, ce ministre lui a répondu par : « Le problème de la charia est posé. Si le problème ne concernait que moi, je dirais que la charia doit être appliquée dans tous les domaines.(…). » Heureusement que les choses ne dépendent pas uniquement de lui et que l’Algérie porte le nom de République démocratique  et populaire.

 

Bouteflika invite les pieds-noirs

 

            Lors d’un entretien accordé par le Président Bouteflika au Figaro magazine du 11 mars 2000, et après avoir fait le bilan de  la crise qui a frappé le pays,  il a lancé une invitation pour les pieds-noirs avec ces termes : « c’est un bilan  qui interpelle toutes les bonnes volontés où quelles se trouvent et sans doute plus encore les hommes et les femmes qui ont un lien affectif avec l’Algérie  tels que justement les français natifs d’Algérie. » avant de préciser que « ce sont aujourd’hui comme hier des citoyens français. A ce titre, leurs rapports avec l’Algérie ne peuvent être dissociés des relations algéro-françaises telles que régies par les différentes conventions et différents accords bilatéraux. » Pour  justifier en quelques sortes l’existence des réactions des islamistes, Bouteflika a déclaré : « de la même manière que vous avez vos courants lepinistes, l’Algérie ne pouvait se payer le luxe d’être en reste sur la France en n’ayant pas elle-même des courants extrémistes, décidément messianiques, rigoureux et sincères dans l’expression d’un racisme antiraciste. De telles situations ne sont pas ingérables, il faut bien ici comme là-bas  hélas, que d’aucuns s’approprient  tel ou tel autre  fonds de commerce pour exister politiquement. ». En ce moment-là  la presse algérienne avait cru que Bouteflika faisait allusion au  islamistes comme Belkhadem qui se sont opposés à la venue d’Enrico Macias. Hélas ! il n’est point de ça, Bouteflika a , au contraire, justifié l’existence de ces compagnons  au pouvoir.   

 

Bouteflika et l’assassinat de Matoub

 

            Pour mieux comprendre la position de Bouteflika par rapport à l’assassinat du chantre de la chanson Kabyle, Lounès Matoub, lâchement assassiné, on a repris ici deux déclaration de la sœur du défunt.

 

Malika Matoub dans les colonnes du quotidien le Matin du 25 juin 2000 : « J’ai effectivement rencontré Rachid Aissat, l’émissaire de Bouteflika. Avant de m’étaler sur cette question, essayons plutôt de tirer un enseignement : quand un président de la République promet publiquement de mener une enquête, alors qu’auparavant on ne cessait de dire que l’affaire de Lounès Matoub connaît une évolution sensible, cela veut dire quoi ? Cela veut dire tout simplement que le Président de la République ne croit pas à la version que je qualifierai d’ « officieuse ». Le seul document officiel existant atteste que Lounès a été tué par un groupe terroriste non identifié. Cette volonté affichée par Bouteflika en septembre1999 n’a pas connu de suivi. On est en juin 2000 sans que rien ne change. Sauf qu’en date du 7 du même mois, l’autorité judiciaire nous a convoqué, pour la reconstitution des faits. Une reconstitution qui me semble plus un repérage des lieux qu’autre chose. Et puis, on ne peut pas faire une reconstitution sans la présence des trois victimes-témoins de cette tragédie : Nadia et ses deux sœurs. Il ne faut pas perdre de vue que Nadia, ma belle-sœur, a avancé sur les ondes de Beur-FM et dans la presse française qu’elle avait subie des menaces et des pressions pour dire que c’est le GIA qui l’avait tué. »

 

 

Malika Matoub dans une conférence de presse, tenue le 26-06-2000 à la maison de la presse à Alger : « Ce qui s’est passé hier(interdiction de la marche pacifique à Alger) est un prolongement de la politique de la loi sur la concorde civile et de l’amnistie. A présent, nous savons que le président a choisi son camp, il protège les tueurs et leurs commanditaires. L’Algérie est le seul pays où les victimes se retrouvent au banc des accusés et où les assassins sont gratifiés de titre de noblesse. » « Le président le la République a déclaré publiquement qu’une enquête sur l’assassinat de Matoub allait être ouverte. Il n’a pas tenu sa promesse et, lorsque nous sommes venus l’interpeller, il a lâché ses hordes sur nous. » 

 

 

Bouteflika et Ait Menguellet :

 

 

            Si le célèbre chanteur Kabyle, Ait Menguellet, a réussi à ne pas être mêlé aux affaires politiques pas les deux partis qui exercent le monopole sans conteste sur la région, Bouteflika a réussi, lui, à le mouiller. Ce qui l’a fortement discrédité aux yeux de ses admirateurs de la région.. Un jour, on se  rappelle que ce chanteur, dont on était l’un des fans, avait déclaré dans la presse : « mon parti, c’est le karaté. »  En 2000, Bouteflika, pour gagner la kabylie,  avait procédé à la création des associations citoyennes. Son représentant était Rachid Aissat.  On a appris que le 30 mars de la même année, Rachid Aissat, conseillé de Bouteflika a procédé à la création de l’association citoyenne de Tizi Ouzou, et durant cette cérémonie d’installation, la presse avait signalé la présence du richissime homme d’affaire Issad Rebrab, du chanteur Fahem, et le comble dans toute cette histoire est  le fait de trouver Ait Menguellet désigné en qualité du président d’honneur de cette association.

 

            Ait Menguellet s’est trouvé sous la contrainte de s’adresser « aux siens » à travers la presse, dans l’espoir de soigner son image. Le 18 avril 2000, à la une du quotidien Liberté, il a écrit « lettre ouverte aux miens » dans laquelle on pouvait lire : « j’adresse cette lettre aux miens pour que ceux qui font du scandale leur pain quotidien ne croient surtout pas que cette lettre constitue une quelconque justification à leurs yeux. Non, ce serait leur faire trop d’honneur en leur accordant une importance qu’ils n’ont pas et qu’ils n’auront certainement jamais. Ceux-là, qu’ils croupissent dans leur fange jusqu’à la fin de leur insignifiante existence. Ma lettre s’adresse aux miens, c’est-à-dire, les gens lucides, pondérés, responsables et qui ont une conception noble et juste de la liberté, aussi bien d’expression que d’action de leurs semblables. Cette lettre s’avère indispensable à plus d’un titre. D’une part, au vu des attaques injustes dont je suis victime, j’ai le devoir de me manifester pour satisfaire ceux qui attendent de moi certaines réponses. (…) Je commencerai par l’événement par lequel la croisade a commencé, en essayant de le situer dans son véritable contexte. Il s’agit, bien sûr, de ma présence au meeting du Président à Tizi-Ouzou et aux fameux applaudissements. D ‘abord, le contexte du moment : le nouveau Président quoi qu’on dise maintenant, était perçu par la majorité comme une chance de remettre le navire « Algérie » à flot. Il avait réussi à gagner la sympathie de tous ceux qui espéraient une issue heureuse à la situation inextricable où se trouvait le pays. Aller donc au meeting de Tizi-Ouzou ne présentait aucun caractère insolite. J’y étais et personne dans toute la foule que j’ai côtoyée n’était étonné de  me voir. Invitation, curiosité, espoir…, tout concourait pour que je ne rate pas ce meeting. (…). » Pour justifier ses applaudissements, Ait Menguellet dit : « Il est tout à fait normal et correct de recevoir, d’écouter et d’applaudir l’opinion de quelqu’un sans pour autant l’approuver. » C‘est vrai qu’il est tout à fait normal de recevoir, d’écouter l’opinion d’autres personnes sans l’approuver, mais je suis désolé de dire que le fait de l’applaudir signifie qu’on l’a approuvé. Peut-on dire que c’est l’effet Bouteflika qui a contaminé ce chanteur au point de prendre les lecteurs pour des naïfs à ce point ?   

 

Visite de journalistes algériens en Israël :

            Quelques jours après la visite de  Bouteflika en France, un groupe composé de journalistes et de profs universitaire s’est rendu en Israël. Mais cette visite qui pourrait faire de l’ombre au président a été immédiatement classée, et par la présidence et par certaines formations politiques qui ont applaudi le tête-à-tête Bouteflika-Ehud Barak, dans le registre des pêchés capitaux.

 

            Cette visite a été dénoncée avec des propos pleins de virulence dans un communiqué de la présidence du 26 juin 2000. Bouteflika, en visite officielle en Tunisie, n’a pas hésité un seul instant pour fustiger ces journalistes, lors de son discours tenu devant les parlementaires tunisiens.  Cela n’était pas suffisant. Le mardi 4 juillet 2000, lors de son discours devant la haute hiérarchie militaire, Bouteflika a ajouté que « notre peuple ne reconnaît point à ce groupe la compétence, le réalisme et l’intelligence qu’il prétend avoir. » En outre, dans un communiqué de la présidence, ces personnes qui se sont déplacées en Palestine ont qualifiés de « traître », des « individus loin des principes et de la dignité ». On pouvait aussi y lire : ils ne sont pas « mandatés à parler au nom du peuple algérien ou de son gouvernement » avant de continuer par « ni le peuple ni le gouvernement ne sauraient admettre cet outrage. »et « Nous affirmons en toute franchise, à l’intérieur comme à l’extérieur, qu’ils ne font pas partie de nous et que nous ne faisons pas partie d’eux. ». Une condamnation des plus fortes qu’on ne puisse imaginer dans un cas pareil. Dans un pays où on ouvre les plateaux de télévision à un émir terroriste , tout est possible. En réaction à ce magma de condamnation, Madame Ait Zai, qui est une enseignante à la fac de droit d’Alger a déclaré à la presse : « Nous ne sommes pas des représentants officiels, mais des individus qui parlent en leur nom propre. ». C’est une phrase très simple, devant un voyage qui aurait pu passer inaperçu. Parmi les formations politiques qui ont réagit par rapport à cet événement, on y trouve le PRA, la formation de Nourdine Boukrouh, qui a applaudi le face-face de Bouteflika avec le premier ministre israélien. Cette formation a qualifie cette visite de « déviation des usages nationaux » avant d’ajouter, dans le même communiqué qu ‘ « aucun citoyen quel quelque soit son statut n’a le droit de piétiner la souveraineté, les usages et traditions de l’Etat algérien. », comme on trouve aussi l’ANR de Réda Malek qui « regrette que cette visite n’ait pas été préparée en concertation avec les autorités algériennes afin de ne pas casser la dynamique prônée par Bouteflika. ». C’est une façon de dire que le peuple est toujours mineur et qu’il n’a pas le droit de faire l’initiative qui pourrait faire de l’ombre à la démarche du pouvoir ?

 

            Une simple visite s’est transformée en un grand événement politique. Le 26 juin 2000, on pouvait lire un communiqué diffusé par l’APS : « le ministre de la communication et de la culture, M. Abdelmadjid tebboune, a été, à partir du lundi 26 juin 2000, ministre délégué chargé des collectivités locales auprès du ministre de l’intérieur et des collectivités locales. Le secrétaire général du ministère de la communication et de la culture assurera l’intérim du ministère de la communication et de la culture. » C’est ainsi qu’on arrive à créer des sujets qui permettent au pouvoir de fuir les véritables dossiers. A écouter toutes les réactions de la présidence, de certains partis politique et voir ceux qui se sont présentés à l’aéroport pour mater les journalistes en question, on dirait que les algériens sont devenus des chauvins de la cause palestinienne, alors que la réalité dit tout a fait le contraire. On se souvient de l’interdiction de la marche de soutien pour la cause palestinienne à laquelle ont appelé certaines personnalités algériennes à l’instar de Ghozali. Là on comprend que tout ce qui avait entouré la visite de ces journalistes  en Palestine n’est qu’une scène d’un film qui a commencé depuis 1962.  Pour mieux saisir cette opération, il suffit de savoir qu’auparavant, il y a eu des visites d’intellectuels algériens en Israël, des visites passées inaperçues. Selon le directeur de Mediterranean Association For cooperation Ressources and Developement, -l’association organisatrice de cette visite-, M. Albert Benabou, interviewé par le quotidien Le Matin (le 1 juillet 2000),  il dit que « Durant les dernières années nous avons reçu plusieurs journalistes, écrivains en Israël. Ces rencontres ont été fructueuses et ont généré un intérêt intellectuel approfondi de la part de tous les participants, qu’ils soient égyptiens, jordaniens, palestiniens, turcs, libanais ou autres. Donc ce n’est pas une visite exceptionnelle. Elle s’enregistre parmi tant d’autres. » Plus loin, M. Albert Benabou a ajouté : « La dernière visite du journaliste israélien de Kol Israël (radio nationale israélienne) à Alger a été reçue de la façon la plus naturelle. ».

 

Bouteflika et la presse algérienne

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Publié dans refuge

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